Divorce, Communauté et société de personnes
L’enjeu : lorsqu’une société de personnes a été créée après le mariage à l’aide de deniers communs, sa valeur financière constitue-t-elle toujours des acquêts de Communauté ?
Constitution de société de personnes et apports
Lors de la constitution d’une société de personnes, les apports effectués par les Associés peuvent être réalisés en numéraire (fonds déposés sur un compte bancaire), en nature (immeuble, matériel, stocks notamment), ou en industrie (savoir-faire technique et spécifique).
Un apport de matériel professionnel constitue un bien propre
Pour l’exercice de son activité professionnelle, un époux est propriétaire de matériel professionnel. Lors de la création ultérieure d’une Société à Responsabilité Limitée, cet époux effectue un apport en nature de son matériel professionnel. Les apports en nature de matériel professionnel effectués par un époux constituent des biens propres de l’époux. Dans ces conditions, les parts sociales représentant la contrepartie du matériel professionnel apporté par l’époux lors de la constitution de la société sont propres à celui-ci
Les statuts doivent mentionner que le conjoint a été averti par son époux de la création de la société
Prenons l’exemple de statuts constitutifs d’une société qui ne mentionnent nullement que l’épouse commune en biens ait été avertie de la constitution de la société à responsabilité limitée (Sarl) d’une part, et qu’elle ait renoncé de manière définitive à sa qualité d’Associée d’autre part. Dans ces conditions, jusqu’à ce que le divorce passe en force de chose jugée, l’épouse a la possibilité de revendiquer sa qualité d’Associée pour la moitié des parts sociales créées par son conjoint à l’aide de deniers communs.
Distinction entre le titre et la finance
Les époux se sont mariés sous le régime légal de la Communauté réduite aux acquêts. A partir du moment où la société a été créée ou acquise pendant le mariage, la valorisation financière de la société constitue un acquêt de la communauté, conformément aux articles 1402 et 1405 du Code civil. En effet, bien que seul l’un des époux soit titulaire des droits sociaux, la valeur financière des droits sociaux appartient à la communauté en vertu de la distinction habituelle entre le titre d’une part et la finance d’autre part.
Conséquence
Compte tenu de ces trois données (l’apport d’un outil de travail en contrepartie de la création de parts sociales / les statuts de constitution ne précisent pas que le conjoint ait été averti de cette création et qu’il ait renoncé de manière définitive à sa qualité d’associé / la distinction entre le titre et la finance pour des époux communs en biens), si l’époux a procédé à la création d’une société de personnes dont il est titulaire des parts sociales, ces titres sont certes propres à l’époux. En revanche, la valeur financière des titres relève du patrimoine propre de l’époux uniquement pour les parts résultant de l’apport de l’outil professionnel. La valeur financière des autres parts sociales relève de la Communauté et constitue des acquêts de Communauté. Lors du divorce et de l’établissement de l’état liquidatif, seule la valeur financière de cette seconde catégorie de parts sociales est référencée.
Bon à savoir : dans une société de personnes ou dans une Société à Responsabilité Limitée, la contrepartie d’un apport en nature constitué par un outil de travail représente des parts sociales propres à l’époux concerné.